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partage afrique 3

HGGSP. La conférence de Berlin et le partage de l’Afrique. Jalon, spé 1re

 Cette proposition pédagogique s’intègre dans la mise en œuvre du Thème 3. Étudier les divisions politiques du monde : les frontières. Axe 1 : Tracer des frontières, approche géopolitique. Jalon. Pour se partager des territoires : la conférence de Berlin et le partage de l’Afrique.

À partir d’une sélection de cartes datant de la fin du XIXe siècle et d’extraits de « l’Acte général » de la conférence de Berlin, les élèves réalisent un croquis cartographique répondant au sujet : « l’Afrique au lendemain de la conférence de Berlin (1885) ». Les productions sont présentées oralement par leurs concepteurs aux autres élèves de la classe. La 2e partie de la séquence repose essentiellement sur l’analyse d’un ensemble de cartes consacrées aux antagonismes coloniaux et à l’achèvement du partage colonial de l’Afrique à la fin du XIXe siècle et au début du XXe.

Pour accompagner cette ressource, une petite synthèse sur le jeu diplomatique des puissances européennes autour de la conférence de Berlin, est également disponible sur le site.

Samuel Coulon est professeur au lycée Sophie-Germain (Paris IVe arr.), interlocuteur académique pour le numérique (IAN) auprès de la Direction du numérique pour l'éducation (DNE), membre et coordonnateur du GIPTIC et chargé de projets pour Canopé d'Île-de-France.

Objectifs

La place dans les programmes

Programme de spécialité d’histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques de première générale.

Thème 3. Étudier les divisions politiques du monde : les frontières. Axe 1 : Tracer des frontières, approche géopolitique. Jalon. Pour se partager des territoires : la conférence de Berlin et le partage de l’Afrique.

Deux axes :

  • Expliciter pourquoi les acteurs tracent des frontières et quelles conséquences ont leurs actions
  • Montrer les affrontements, débats et négociations liés aux frontières

Les Jalons

« Des jalons sont définis pour la mise en œuvre des composantes du thème. Il s’agit d’exemples qui, problématisés, permettent de circonscrire le traitement du thème. Les jalons peuvent être traités de diverses manières, notamment par une présentation conduite par le professeur comme par des exposés et/ou des dossiers individuels ou collectifs à l’initiative des élèves, le tout s’appuyant sur des documents que les élèves peuvent étudier individuellement ou en groupe. Le professeur apprécie le degré d’approfondissement de l’étude de chaque jalon. »

 

Objectifs en termes de contenus

Pourquoi, alors qu’elle ne procède pas directement au partage de l’Afrique, la conférence de Berlin en est-elle devenue le symbole ?

La conférence de Berlin

La conférence de Berlin organisée par Bismark du 15 novembre 1884 au 26 février 1885 ne réalise pas un partage de l’Afrique. Les territoires concernés dans les négociations sont les bassins du Congo, du Niger et leurs prolongements. La question du tracé des frontières coloniales ne relève pas de la conférence mais d’accords bilatéraux entre les États européens signés avant, après et même en coulisse des travaux de la conférence. Le texte définitif de la conférence est un « Acte général » sur des principes qui justifient la colonisation et non un « acte final » de partage. Les pays signent un compromis sur une série d’engagements économiques (liberté de commerce et de navigation), politiques (neutralité des territoires) et moraux (interdiction de l’esclavage, tolérance religieuse, liberté missionnaire, mission civilisatrice). Si « l’Acte général » indique que les puissances signataires entendent « prévenir les malentendus et les contestations que pourraient soulever à l'avenir les prises de possession nouvelles sur les côtes de l'Afrique » (article 34), cette disposition reste limitée car il y a peu de zones côtières inoccupées par les Européens à cette époque [Wesseling].

Le partage de l’Afrique

Au XIXe siècle, la plupart des frontières coloniales africaines sont arbitrairement tracées par les puissances européennes. Souvent rectilignes, elles morcèlent les peuples d’Afrique et les entités politiques existantes entre différentes colonies et empires européens. Dans un contexte de concurrence entre États, le tracé des frontières constitue un enjeu majeur pour les puissances européennes. Des traités divisent des territoires avant même d’en connaître leurs caractéristiques géographiques ou historiques (ex. : Congo). Les frontières coloniales départagent de nouvelles zones de souveraineté (françaises, britanniques, allemandes…), elles-mêmes subdivisées en territoires ayant leurs propres règles administratives et leur propre statut : compagnie à charte, dominion, condominium, colonie, département, protectorat,  zone d’occupation, possession personnelle d’un souverain.

Cartographier le partage de l’Afrique au XIXe

Plusieurs sites proposent des versions numériques de cartes anciennes. Le département « Cartes et plans » de la BnF met à disposition sur Gallica près de 400 cartes d’Afrique datées du XIXe siècle d’origine française, belge, britannique, allemande et portugaise (figure 1). Les dates d’édition montrent une très forte augmentation de la production entre 1800 et 1900. À titre d’exemple, 90 cartes (disponibles en ligne) ont été réalisées dans la décennie 1880-1890, et 30 pour l’année 1890. À la fin du XIXe siècle, les cartes sortent du domaine réservé aux militaires. Elles sont de plus en plus réalisées par des géographes et se diffusent plus largement au grand public. Elles intègrent l’enseignement, et la presse s’y intéresse (ex- le Temps 1889).

La bibliothèque de l’université d’Urbana-Champaign dans l’Illinois propose aussi un important fonds de cartes anciennes sur l’Afrique (2527 cartes de l’Afrique datant de 1508 à 1900). L’intérêt majeur de ce site est la possibilité – contrairement à Gallica - de télécharger gratuitement toutes les cartes en très haute résolution (figure 2).

Fig. 1. Interface de Gallica  / Fig. 2. Site de l’université d’Urbana-Champaign

Afrique Fig 1. recherche-gallica afrique   Afrique Fig 2.

Les représentations cartographiques procèdent d’une lecture interprétative du monde. Pour reprendre les propos de Michel Foucher, « c’est une représentation graphique intentionnelle à partir d’informations relatives au monde que l’on connaît au moment où l’on fait la carte - une vision subjective. Avec une sélection car on ne peut jamais tout représenter (Libération - 08.01.2011) ».

Les cartes d’Afrique du XIXe siècle sont conçues comme des instruments d’appropriation des territoires. Les espaces qui n’ont pas encore été officiellement conquis sont laissés en blanc, comme si ces derniers avaient vocation à se « colorer » (figure 3).

Ainsi, une carte intitulée « L’Afrique au 1er janvier 1890 »  (figure 4) référence en légende : 1. la liste des territoires occupés par les Européens, 2. sept « États indépendants » (oubliant ainsi tous les autres États africains !) 3. les « Pays non attribués », soit 18 156 km2  !

Fig. 3. L’Afrique française, ce qu’elle est, ce qu’elle doit être (1890) / Fig. 4. L’Afrique au 1er janvier 1890 (1891)

Afrique Fig 3. L'Afrique française Ce qu'elle est   Afrique Fig 4. 1890 L'Afrique au 1er janvier

Ces cartes témoignent tout naturellement de l’état des connaissances géographiques du moment, mais surtout de la vision des Européens sur le continent africain qui, souvent, anticipent la conquête. De nombreux territoires signalés comme étant des possessions européennes ne sont en réalité pas contrôlés. Les États africains sont parfois représentés, mais de façon très confuse, sans couleur et sans indications précises en légende (« Africa » 1885). Les informations ne sont pas les mêmes d’une carte à l’autre, les frontières ne concordent pas. L’exemple de l’Owambo Land (Nord de la Namibie) représenté sur deux cartes datées de 1886 illustre bien ce phénomène. La course aux colonies en Afrique constitue un vrai casse-tête pour les cartographes et les géographes, forcés de mettre à jour leurs réalisations « en un temps record » !  Parfois au crayon !

Fig. 5. Une carte allemande de 1886, signale l’existence de République d’Upingtonia, un État éphémère boer proclamé en 1885 et annexé au SO Allemand deux ans plus tard (Nord de l'actuel Namibie). / Fig. 6. Une carte portugaise de 1886 présente une nomenclature et un tracé des frontières très différents.

Afrique Fig 5. Damaraland Upingtonia   Afrique Fig 6. Damara-Land

 

Objectifs méthodologiques

Trois capacités du programme

  • Analyser, interroger, adopter une démarche réflexive (confronter un texte et des points de vue de différents cartographes sur un même territoire à des périodes et à des échelles différentes : Bassin du Congo/continent africain – 1885/1890/ …. 1914).
  • Travailler de manière autonome (sélection de cartes, conception d’un croquis à l’aide d’un logiciel de dessin vectoriel).
  • S’exprimer à l’oral (restitution orale du travail réalisé aux autres élèves de la classe).

Compétences PIX

  • Information et données. Mener une recherche et une veille d’information, Gérer des données, Traiter des données.
  • Communication et collaboration. Interagir, Partager et publier, Collaborer, S'insérer dans le monde numérique.
  • Création de contenu. Développer des documents textuels, Développer des documents multimédia, Adapter les documents à leur finalité, Programmer

Référentiel PIX

Description

Ressources documentaires

  • pdf downloadUn dossier documentaire (extraits de l’Acte général - 3 cartes). On peut proposer aux élèves de chercher et de sélectionner eux-mêmes deux ou trois cartes anciennes sur les sites évoqués plus haut [Séances 1 et 2]
  • pdf download Un fond de carte de l’Afrique (SVG PDF) [Séances 1 et 2]
  • pdf download Une grille d’évaluation de la qualité de la carte pour se préparer à la présentation orale. [Séances 1 et 2]
  • pdf download Une série de cartes sur le partage de l’Afrique avec chronologie intéractive [Séances 3]

 Outils utilisés

  • Un logiciel de dessin vectoriel pour la réalisation des croquis cartographiques (Inkscape)
  • Un logiciel de retouche photo pour améliorer la lisibilité des cartes
  • Un ENT pour une mise à disposition des fichiers

 

Articulation de la démarche

Schema sq confrence Berlin

 

Description détaillée des séances de travail


Picito dialogue1re heure. La conférence de Berlin

1. Enoncé de la problématique en s’appuyant sur la caricature de Draner publiée dans l’Illustration le 3 janvier 1885.

« Pourquoi, alors qu’elle ne procède pas directement au partage de l’Afrique, la conférence de Berlin en est-elle devenue le symbole ? »

2. Analyse de l’Acte général de la conférence. Après quelques éléments d’explication sur l’origine, le déroulement et les conséquences de la conférence, il s’agit d’identifier les acteurs et de comprendre les motivations des Européens qui aboutissent au partage de l’Afrique : préoccupations géostratégiques et nationales, intérêts économiques, motivations morales et religieuses, curiosités ethnographiques et géographiques [non évoqué dans l’Acte général] …

3. Présentation des collections de cartes de l’Afrique au XIXe siècle et analyse critique des 3 cartes du dossier documentaire (présentation des auteurs, objectifs recherchés, langage cartographique etc.). C'est l’occasion de donner quelques conseils de recherche sur le site Gallica (afficher « 50 résultats par page » et trier par « ordre de d’édition croissante » pour accéder plus rapidement aux 7 cartes de l’année 1885 et plus largement aux 90 cartes de la décennie 1880-1890, utiliser l’outil Zoom de l’interface pour lire les nomenclatures les plus petites).

Fig 7. Affichage des cartes par date sur Gallica

Afrique Fig 7. recherche gallica afrique01

L’ancienneté des cartes, souvent « jaunies » par le temps, empêche une bonne lisibilité des couleurs. Les cartes des sites étant téléchargeables, l’utilisation d’un logiciel de retouche d’image comme Gimp, permet d’accentuer les contrastes et de différencier davantage la palette chromatique.

Fig. 8. Image avant retouche sur Gallica / Fig. 9. Image après retouche

Afrique Fig 8. Bassin Congo 1885   Afrique Fig 9. Partie de l'Afrique équatoriale pour [...]Desbuissons Edouard traitée

4. Réalisation d’un croquis cartographique. Par groupe de deux, les élèves réalisent une carte répondant au sujet suivant : « Le partage colonial de l’Afrique au lendemain de la conférence de Berlin (1885) ». Conçue pour être proposée en salle informatique avec l’utilisation d’un logiciel libre de dessin vectoriel comme « Inkscape » ou « Office Draw », cette activité peut être réalisée en salle de classe en réalisant la carte sur feuille.

Le travail consiste à confronter les informations contenues dans l’Acte général de la conférence avec la sélection de 3 cartes réalisées à la même période (une carte française et une carte italienne de 1885, une carte française de 1891). Les élèves doivent identifier et sélectionner les territoires et les informations utiles à la réalisation du croquis ;  croiser ces informations ; les reformuler afin d’établir une liste des items de la légende ; classer et ordonner ces items ; enfin choisir un figuré pour chacun d’eux. Les cartes de l’époque étant très différentes – selon les objectifs du cartographe - il est nécessaire de simplifier le tracé des frontières. Ce qui compte c’est de bien faire figurer l’ancrage littoral des puissances coloniales. Les élèves sont invités à terminer leur travail pour le cours suivant.

 

Picito expose2e heure. Présentation des croquis sous forme d’exposés

Les groupes d’élèves expliquent les résultats de leur recherche et présentent leur croquis. Si les diverses réalisations reflètent les compétences acquises par les élèves dans le domaine de la cartographie, elles révèlent aussi la diversité de leur questionnement sur le plan chronologique, politique et spatial : qu’entend-on par « Le partage colonial de l’Afrique au lendemain de la conférence de Berlin (1885) » ? Doit-on se limiter à l’année 1885 ? Peut-on aller au-delà ?  Si oui, jusqu’à quand ? Doit-on représenter uniquement les espaces coloniaux ? Qui sont les acteurs ? Comment utiliser des informations avec aussi peu de fiabilité ? Etc.

Fig. 10. Réalisation du croquis avec Inkscape / Fig. 11. Réalisation du croquis sur feuille

Afrique Fig 10. Carte d'éleve réalisée avec Inkscape   Afrique Fig 11. Réalisation d'élève sur feuille 

La première difficulté est liée à l’évolution rapide des frontières des territoires colonisés « au lendemain de la conférence ».  Il faut faire des choix et ne pas chercher l’exhaustivité, d’autant que ces frontières ne correspondent pas forcément à une occupation réelle sur le territoire.  On peut s’appuyer sur la carte n°1 du dossier documentaire pour délimiter les territoires coloniaux d’Afrique centrale (Congo français, EIC, Angola, Mozambique) ; la carte n°2 pour les autres colonies françaises, britanniques, allemandes, espagnoles, italiennes ; la carte n°3 pour confirmer les informations précédentes et reporter la nomenclature. L’ajout de flèches indiquant les axes de pénétration des puissances coloniales permet de mettre l’accent sur les dynamiques spatiales de la colonisation vers les terres intérieures et d’inscrire le croquis dans un espace temporel plus large.

La plus grande difficulté consiste à délimiter avec exactitude les espaces concernés par la déclaration relative à la liberté du commerce (article 1er de l’Acte général). Il est fait mention du bassin du Congo et ses affluents (voir carte 1 ci-dessous et point n°1 de l’article 1erde l’acte général), mais aussi de ses prolongements terrestres et maritimes au Nord-Ouest et au Sud-Ouest (point n°2 de l’article 1er) et de ses prolongements à l’Est du continent jusqu’à l’Océan Indien (point 3 de l’article 1er). Localiser les lieux de l’article 1 étant très complexe (même avec Google maps), il est difficile pour les élèves de cartographier le bassin « conventionnel du Congo » avec les informations dont ils disposent.

Fig 12. Délimitation du bassin du Congo et de ses affluents sur une carte de 1885
Fig 13. Bassin dit « conventionnel » du Congo qui regroupe le bassin du Congo, ses prolongements Nord-Sud sur la côte occidentale et une zone orientale jusqu’à l’Océan Indien

Afrique Fig 12. Bassin-congo   Afrique Fig 13. Bassin congo élargi

Pour conclure cette séance, on peut s’interroger sur les modes de représentation graphiques du partage de l’Afrique dans les productions cartographiques contemporaines.

Avec les mêmes informations, ces cartes proposent deux lectures différentes.

Fig.14 L’absence de couleur pour représenter les États africains renforce l’idée d’un partage inéluctable du continent.
Fig.15 L’utilisation de la couleur pour les États africains face aux couleurs sombres des puissances coloniales, met en évidence leur disparition.

Afrique Fig 14. L'Afrique en 1902 v1    Afrique Fig 15. L'Afrique en 1902 v2

 

Picito magistral3e heure. Le partage de l’Afrique à la fin du XIXe siècle

Dans cette seconde partie de la séquence, le professeur met en perspective la conférence de Berlin en s’appuyant essentiellement sur un ensemble de cartes conçues à partir des apports de la recherche de ces dernières décennies. L’objectif est de comprendre comment les Européens réalisent un nouveau découpage politique sur la quasi-totalité du continent africain à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Les conquêtes coloniales entrainent des rivalités entre les grandes puissances et des résistances des populations africaines.

Carte 1. L’Afrique à la veille de la conférence

Carte n°1 Le partage de l'Afrique (1880-1914)

Les limites politiques africaines (empires, royaumes, cités-États, chefferies …) sont connues et reconnues par les peuples africains (y compris des populations nomades). Si dans certains cas, les frontières les plus éloignées du pouvoir restent imprécises, d’autres sont matérialisées par des bornes ou des pierres. L’arrivée des Européens bouleverse l’organisation politique et sociale de toute de l’Afrique.

 

 

 

 Carte 2. L’Afrique en 1885

Carte n°2 Le partage de l'Afrique (1880-1914)

Les frontières sont fixées selon le principe de la primauté de l’installation à partir du littoral et en fonction des rapports de forces entre les puissances coloniales. Elles peuvent s’appuyer dans certains cas sur des éléments naturels comme les fleuves, les cours d’eau ou les montagnes. Les formes de certaines colonies, en bandes perpendiculaires au littoral (Togo, Bénin) ou le long d’un fleuve (Gambie), sont le résultat d’un découpage qui prend peu en compte l’organisation politique antérieure du continent. Les Européens installés sur la côte reculent les limites de leurs territoires jusqu’à ce qu’ils rencontrent une zone d’influence voisine.

On peut souligner le cas particulier des républiques Boers en Afrique australe. Situées à l’intérieur du territoire africain (sans ouverture maritime), ces États indépendants jusqu’en 1902 ont été créés par les colons d’origine franco-néerlandaise (les « Boers » ; prononcer « bour ») présents dans la région du Cap depuis le XVIe siècle, puis chassés de leur territoire par les Britanniques dans la 1re moitié du XIXe siècle.

Les conquêtes territoriales ne se font pas sans opposition. Les résistances africaines à la colonisation sont nombreuses et les Européens doivent parfois s’engager pendant plusieurs années dans des conflits armés difficiles (Ashanti en Gold Coast, Zulu en Afrique du Sud, empire de Sokoto au Nigéria, insurrection mahdiste au Soudan, Senoussis au Sahara, Samory Touré en Côte-d’Ivoire et en Guinée etc …).

 

Cartes 3 & 4. L’antagonisme des impérialismes européens : les « rêves africains » de l’Europe 

Carte n°3 Le partage de l'Afrique (1880-1914)

Les Britanniques veulent s’implanter sur un axe Nord-Sud, du Caire au Cap. Les Français souhaitent constituer un axe Dakar-Djibouti, qui permettrait une jonction avec le Congo français. Si les Allemands envisagent de relier le Cameroun avec l’Afrique orientale allemande, leur projet prend fin avec la reconnaissance de l’État indépendant du Congo pendant la conférence de Berlin puis la signature d’un traité avec la France qui fixe la frontière entre le Cameroun allemand et les possessions françaises (24 décembre 1885). Le Portugal imagine un vaste empire situé entre l’Angola et le Mozambique. Son rêve s’écroule lui aussi face à l’expansion hégémonique anglaise en Afrique australe.

 

Carte n°4 Le partage de l'Afrique (1880-1914)Finalement, le projet britannique semble s’imposer à tous. Deux expéditions françaises tentent néanmoins une jonction à partir de Djibouti (avec autorisation des autorités éthiopiennes) et du Congo français : c’est la mission Marchand. Cette dernière arrive à Fachoda au Sud du Soudan en juillet 1898. Marchand s’installe dans un vieux fort abandonné et y plante le drapeau français. Lord Kitchener, à la tête des troupes anglaises envoyées au Soudan pour mettre fin à l’insurrection mahdiste, arrive à Fachoda en septembre pour déloger les Français. Devant le risque d’une guerre, la France cède et, en mars 1899, un accord délimite les frontières entre les deux empires coloniaux. En échange, les Britanniques s’engagent à soutenir les Français dans leurs revendications sur le Maroc. En 1902, les Britanniques réalisent enfin leur projet par l’annexion des deux républiques boers.  Si l’on met à part les deux « guerres des Boers »,  les tensions consécutives aux partage de l’Afrique ne donneront lieu à aucune guerre ouverte entre Européens.

Carte 5. Territoires administratifs et empires coloniaux au début du XXe

Carte n°5 Le partage de l'Afrique (1880-1914)

Les empires coloniaux européens sont subdivisés en plusieurs territoires administratifs. Leur diversité résulte du rapport de force avec les populations colonisées et les autorités locales, de l’importance économique et géopolitique de territoires considérés comme stratégiques, des modes d’administration des puissances coloniales et de la présence plus ou moins importante de colons européens. Bien que l’hétérogénéité des statuts et les « principes d’exception soient la règle » on peut distinguer : les colonies, les protectorats, les territoires sous l’autorité d’une compagnie à charte, les départements, un condominium et une possession personnelle d’un souverain (jusqu’en 1908).

 

CONCLUSION

Si la conférence de Berlin n’établit aucune frontière en Afrique, elle a eu comme principal effet l’accélération de la conquête du continent. En 20 ans, l’essentiel des frontières sont définies par les Européens.  Les ¾ du territoire sont sous leur contrôle en 1902. Il reste à conquérir le Sahara, une partie du Sahel, le Maroc et la Tripolitaine, sous contrôle des Ottomans. Ce sera chose faite à la veille de la Première Guerre mondiale : la Tripolitaine est annexée par l’Italie en 1911, et le Maroc par la France en 1912. Seuls le Liberia et l’Ethiopie restent des États indépendants.

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

  • BRUNSCHWING Henri, Le partage de l’Afrique noire, Flammarion, Paris, 1971
  • COQUERY-VIDROVITCH Catherine, L'Afrique et les Africains au XIXe siècle, Armand Colin, Paris, 1999
  • M’BOKOLO Elikia,  Afrique Noire. Histoire et civilisations du XIXe siècle à nos jours, Hatier, Paris, 2004
  • MICHEL Marc,  Fachoda, guerre sur le Nil, Larousse, Paris, 2010
  • WESSELING Henri,  Le partage de l’Afrique (1880-1914), Denoël, Paris 1996

ATLAS HISTORIQUES

  • SELLIER Jean, Atlas des peuples d’Afriques, éditions la Découverte, Paris 2008
  • Grand Atlas des empires coloniaux, Autrement, Paris 2015
  • JOLLY Jean, L’Afrique et son environnement européen et asiatique, L’Harmattan, Paris 2008

Ressources numériques

Captations audio