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Ecueils et dérives possibles

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  Quelques précautions par rapport à la pédagogie différenciée

  • La différenciation se doit d’être efficace, de motiver les élèves et de s’adapter à chacun. Or la recherche sur les pratiques de pédagogie différenciée a mis en évidence que l’exercisation fait souvent l’objet de différenciation. La différenciation porte souvent sur l’acquisition de procédures de base sans permettre la mobilisation de celles-ci dans une tâche plus complexe.
  • Les pratiques de pédagogie différenciée impliquent l’acquisition d’une certaine autonomie de travail de la part des élèves qui doit se faire sans nuire à l’apprentissage cognitif. Rappelons que la finalité de la différenciation est de permettre aux élèves d’apprendre mieux. Si nombre de pratiques différenciées conduisent à des activités autonomes, il importe donc de ne pas négliger leur structuration et leur fixation La pédagogie différenciée peut creuser les écarts entre les élèves si l’on enferme les élèves dans leur singularité. Pour éviter ce piège, garder un objectif constant d’acquisition de compétences minimales communes pour tous est essentiel. Il est important de souligner qu’il ne s’agit donc pas de baisser ses objectifs mais bien de mettre en œuvre des moyens différents pour permettre à tous d’acquérir les compétences minimales prévues par les Socles.
  • La pédagogie différenciée implique de penser chaque élève comme capable d’apprendre. C’est ce que Meirieu nomme « postulat d’éducabilité ». Selon cet auteur, pour réussir le pari éducatif, il faut mettre tout en œuvre, tout tenter pour que l’élève réussisse, « s’obstiner à inventer tous les moyens possibles pour qu’il apprenne mais en sachant que c’est lui qui apprend et que, tout en exigeant le meilleur, je dois me préparer à accepter le pire... et surtout continuer à exiger le meilleur après avoir accepté le pire !».
  • La différenciation est affaire de convictions professionnelles et de valeurs éthiques :
    • conduire tous les élèves à un ensemble de compétences minimales ;
    • apprendre aux élèves à être autonomes ;
    • concevoir l’hétérogénéité comme un levier et une richesse d’apprentissages …

Elle ne peut se construire qu’en terme d’intention de la part de l’enseignant. Il doit s’interroger sur le pourquoi, (pour quoi) de ses pratiques avant de s’interroger sur le comment. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons encourager le lecteur à se lancer dans la pédagogie différenciée, petit à petit, sans changer complètement ses pratiques, en testant, tâtonnant, discutant avec ses collègues mais toujours en ayant en tête la question du « pourquoi je mets en place telle pratique ».

Des écueils et des dérives possibles

La différenciation pédagogique rencontre un certain nombre d’écueils et de dérives possibles à prendre en compte et à dépasser :

  • La planification de l’enseignement en fonction de taxonomies d’objectifs ; les grilles d’objectifs étant des outils de régulation plutôt que les organisateurs de situations complexes d’enseignement-apprentissage ;
  • La prégnance du modèle de la remédiation et du soutien pédagogique, selon lequel la différenciation est essentiellement réparatrice et n’intervient que lorsque les difficultés sont importantes, voire irréversibles ;
  • La confusion entre pédagogie différenciée et préceptorat généralisé, l’impression que différencier, c’est faire autant de cours particuliers qu’il y a d’élèves ;
  • Des attentes moins fortes vis-à-vis des élèves moins avances, voire faibles, qui déterminent d’une part une participation réduite de leur part aux faits d’enseignement et d’autre part leur exclusion à des activités retenues trop complexes ;
  • La priorité́ aux évaluations sommatives entraînant des corrections en lien avec une norme attendue sans attention avec les stratégies et démarches cognitives, les méthodes de travail mobilisées dans les taches proposées ;
  • La coexistence rare entre une évaluation formative qui exige la confiance et la coopération des apprenants et une évaluation sommative ou certificative qui les replace dans la confrontation à la norme, sans avoir le courage de différer fortement les décisions de certification ou de sélection ;
  • L'exploitation inefficace du diagnostic, des erreurs comme des réussites, mais sans lier immédiatement l’évaluation à des tentatives de régulation, dans un processus dynamique et interactif ;
  • Le développement de pratiques d’autoévaluation qui entraine souvent à̀ intérioriser le jugement du maître plutôt qu’à développer chez l’apprenant des capacités de métacognition et de régulation de ses processus d’apprentis- sage et de production, dans le sens d’une évaluation formatrice.