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Travail de recherche des élèves du collège Lucie Faure

Des élèves historiens de la mémoire

Compte rendu du projet Partager & se Souvenir ~ 2020-2024 par M. Farella, professeur d'histoire-géographie

Sur l’idée de Romuald Oumamar, professeur d’Arts Plastiques, mes collègues et moi avons lancé en 2020-2021 un projet pour retracer l'histoire et raviver la mémoire de Chana Finkielsztajn, jeune fille déportée à Auschwitz dont le prénom, le nom et l’âge apparaissent sur la plaque à l'entrée de notre collège. Nous avons travaillé avec une classe de 3e et l’ensemble de l’équipe pédagogique. Grâce aux investigations de nos élèves, nous avons pu retrouver la trace du frère de Chana, Maurice Finay, qui a survécu comme enfant caché et qui a pu nous fournir de précieux documents. Nous avons aussi reçu le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et les précieux conseils du Mémorial. Deux autres noms apparaissent sur la plaque commémorative et ont fait l'objet d'une nouvelle année d'étude avec des élèves de 3e entre novembre 2021 et mai 2022. Il s'agit de ceux d'Alice et Marie Ghaloula, âgées de 12 et 15 ans quand elles ont été envoyées dans le camp de la mort d'Auschwitz en 1943. Les élèves ont ainsi poursuivi le travail engagé par la pose de la plaque dans le collège en contactant le Mémorial pour faire corriger une erreur de nom de famille sur le Mur des Noms : Raymond (photographie ci-contre), le frère d’Alice et Marie, n’apparaissait pas comme membre de la famille. Son nom était orthographié sans le « h ». La correction a eu lieu sur le site Internet du Mémorial de la Shoah au lendemain du vernissage de l’exposition des élèves et une nouvelle gravure sur le Mur est envisagée après 2025.

L’enjeu pour 2022-2023 a été de consacrer notre projet à l’histoire d’Estelle Lublinski. Selon nos premières recherches, elle aurait été arrêtée avec sa mère lors de la rafle du 16 juillet 1942, à la différence des autres jeunes filles qui l’ont été plus tardivement. Au lendemain des commémorations des 80 ans de la rafle du Vel d’Hiv, nous pourrons nous appuyer sur les documents les plus récents. Estelle Lublinski a été internée ensuite au camp de Pithiviers avant d’être assassinée en 1942 à Auschwitz, alors âgée de 9 ans. Avec l’aide du Cercil, nous avons pu collecter de nombreux documents à exploiter avec les élèves grâce à Guillaume Sylvain. Un parcours-mémoire (Dimitri Landre) a été élaboré pour se rendre à Orléans et à la gare de Pithiviers où vient de s’ouvrir un lieu de mémoire et de travail pédagogique.  

Nous avons envisagé cette année un nouveau partenariat, avec trois classes de CM1-CM2 de l’école primaire qui jouxte notre collège et où étaient scolarisés les garçons pendant la Seconde Guerre mondiale dont les frères d’Alice et Marie Ghaloula.

Nous travaillons avec la réalisatrice Aurélia Raoull, l'ingénieure du son Pascale Mons, le dessinateur Damien Roudeau, l'art-thérapeute Patrick Laurin, le journaliste Denis Cosnard et le guide conférencier Stéphane Meusnier. Les élèves de Troisième ont été récompensés par le prix du Petit Lafue en mai 2021 au moment où Hélène Dumas a reçu le sien pour son travail sur le génocide au Rwanda à hauteur d'enfants. Ce projet a été mis à l’honneur dans la revue du XXe arrondissement (juin 2021, pages 8-9) et sur le site de La Fondation pour la Mémoire de la Shoah, Dominique Trimbur, son chargé de mission, a été présent à chacun des vernissages des expositions des élèves. Il en va de même de Denis Cosnard, journaliste au Monde. L’Association L’Enfant et la Shoah soutient également ce travail et nous a déjà prêté gracieusement des panneaux d’exposition. Céline Largier Vié, maître de conférences en linguistique allemande et française à la Sorbonne nouvelle, nous a apporté aussi un contenu scientifique sur les plaques parisiennes.

Un moment qui restera très certainement aussi dans la mémoire des élèves de 3eA, est la rencontre avec Rachel Jedinak. Avec le Comité de l’Ecole de la Rue Tlemcen, elle est à l’origine de la pose de la plaque de notre collège et elle a suivi notre projet depuis son lancement. Elle est venue en parler avec les élèves et livrer les souvenirs très précis qu’elle a encore de son enfance : elle avait 8 ans (le même âge que Jacques Ghaloula) au moment de son arrestation, avec sa sœur et sa mère, lors de la Rafle du Vélodrome d’Hiver en juillet 1942.

Nous sommes tout à fait conscients qu’il sera toujours impossible de retrouver entièrement la vie d’une personne. Les élèves ont déjà beaucoup appris de Chana Finkielsztajn et de la famille Ghaloula, nous sommes convaincus que les recherches futures seront très instructives, aussi fragmentaires soient-elles. Notre travail s’inspire beaucoup des œuvres de Christian Boltanski dont les lieux de mémoire sont chargés d’une « mémoire trouée ». Tous les objets qu’il nous présente ne donnent jamais accès à une mémoire entière. Mais le spectateur de ses œuvres peut pallier le manque d’information en se référant à ses propres souvenirs, à sa propre imagination.  

Illustlucie Faure

Exposition produite par les élèves

 

L'ensemble du projet est consultable sur le site du collège Lucie Faure

En téléchargement, un bilan du projet en mai 2023 ainsi que les QR codes des capsules audio réalisées par les élèves