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Culture d’en haut, culture d’en bas

L.W.Lévine

Coll. Laboratoire des sciences sociales. Ed. La Découverte. Avril 2010.

L’ouvrage jouit, outre-Atlantique d’une réputation flatteuse dans la mesure où il a largement renouvelé la compréhension de la réception des œuvres culturelles, de la « légitimité culturelle », des politiques culturelles et de la place des publics dans les institutions. On regrettera simplement qu’il ait fallu attendre 22 ans ( ! ) pour que cet ouvrage, paru en 1988 aux Etats-Unis, soit accessible en français. Le questionnement de départ de l’auteur est le suivant : comment la culture, aux Etats-Unis, est-elle passée d’une réalité partagée par des publics socialement diversifiés à un univers nettement séparé des pratiques culturelles, les plus « légitimes » ayant eu tendance à être de plus en plus réservées à une élite ? Pour y répondre, il retrace l’histoire des formes d’expression qui constituent aujourd’hui la « culture savante » ou « légitime » (théâtre, en particulier shakespearien, opéra, musique symphonique et musée). Par un « processus de sacralisation et de bifurquation », la culture partagée qui caractérisait les Etats-Unis jusqu’au milieu du XIXème siècle, se serait fragmentée en cultures spéarées et hiérarchisées. L’auteur analyse les rapports de pouvoir (et même de domination) à l’œuvre dans la définition, l’organisation et la réception de la culture et montre comment la notion même de culture s’est progressivement trouvée associée aux notions d’ordre et de hiérarchie, et comment les publics ont été « disciplinés », de sorte que les tentatives faites pour produire une culture s’adressant à tous sont devenues très hasardeuses ! Et que les politiques culturelles semblent aussi, de ce point de vue, avoir à peu près baissé les bras. Ouvrage truffé d’exemples, donc d’une lecture relativement aisée et enrichissante.