Les Padoues, des coqs et des poules... presque comme les autres !
Une Padoue (poule sur la photographie de gauche) est un tétrapode bipède dont les membres antérieurs sont des ailes, au corps couvert de plumes (seule apomorphie rendant facilement identifiable ce taxon), avec un bec corné dépourvu de dents.
-> C'est un Oiseau.
Elle a un bréchet (extension du sternum).
-> C'est un Carinate.
La mandibule inférieure du bec porte deux prolongements marqués, un processus angulaire incurvé vers l’arrière et un processus médial redressé.
-> C'est un Galloanserae.
Elle a des traits de caractères correspondant à un mode de vie terrestre, un corps dodu, un bec court et solide, des ailes arrondies.
-> C'est un Phasianidé.
Parmi les Phasianidés, les espèces du genre Gallus ont un fort dimorphisme sexuel. Habituellement, les coqs possèdent des ergots sur les tarses, une crête et des barbillons développés alors que les poules ne possèdent pas d'ergot et que les barbillons et crêtes sont peu développés. Les poules sauvages sont même dépourvues de crêtes.
Les poules et les coqs de la race Padoue sont caractérisés par une huppe, une barbe (amas de plumes duveteuses sous le bec) et des favoris (ensemble de plumes couvrant les oreillons), tous trois bien développés. Les barbillons, s'ils sont présents, sont masqués mais ni le coq ni la poule n'ont de crête. Leur crâne, dit "de Padoue", présente en revanche une excroissance sommitale. La queue des mâles porte des plumes en faucilles, longues et arquées.
Il s'agit d'une race ornementale qui existe depuis l'Antiquité, mais dont la forme naine n'a été sélectionnée qu'au 19e siècle. La poule peut toutefois pondre jusqu'à 120 oeufs par an. Celles d'autres races pondent quelques dizaines à 300 oeufs par an, le record de 371 oeufs en une année étant attribué à une poule Leghorn blanche du Missouri.
La domestication
Gallus gallus domesticus est constituée d’un ensemble de populations, résultat d’une domestication de 7 à 8 millénaires. L’origine exacte de la poule domestique est contestée. Gallus gallus (coq sauvage rouge ou coq doré, parfois coq Bankiva ci-à-gauche), originaire du Sud-Est asiatique, a longtemps été présumé comme seul ancêtre sauvage, mais une étude récente semble montrer que le phénotype couleur jaune de la peau proviendrait d'une des trois autres espèces de jungle, Gallus sonnerati (coq gris), qui lui vit au sud et à l'ouest de l'Inde. La dissémination a été assurée à partir de quelques centres de domestication par les migrations humaines.
La création des races traditionnelles, par une certaine standardisation des populations indigènes, semble toutefois avoir été réalisée essentiellemment au cours du XIXe siècle. Elles ont été sélectionnées pour la ponte (ponte toute l'année de plus gros œufs), la chair (plus grande taille à l'âge adulte), le combat (agressivité, longues pattes sur un corps court et érigé) ou l'ornementation. Après la seconde guerre mondiale, d'autres races ont été produites (notamment pour permettre un élevage en batterie).
La comparaison statistique de séquences nucléotidiques a montré que plusieurs sites du génome présentent, chez les races domestiquées par rapport aux populations sauvages, une fréquence allélique élevée pour un allèle donné, ce qui témoigne de leur sélection. En particulier, une mutation du gène codant le récepteur THSR de l'hormone thyréostimuline (TSH) est absente du génome des populations sauvages mais est présente dans celui des races domestiques or, chez la caille du moins, la TSH est impliquée dans la régulation de la reproduction par l'alternance jour-nuit (photopériode) : ainsi, il est possible que la modification de la ponte saisonnière, propre aux populations sauvages, au profit d'une ponte s'échelonnant toute l'année soit liée à une modification du récepteur THSR, sélectionnée de génération en génération (l'analyse d'os de poulets a montré que cet allèle n'était présent que dans 40 % des spécimens il y a un millénaire alors que 100 % des os issus d'individus actuels le présente quelle qu'en soit sa race).
La race Sebright, l'une des premières races produites par les humains
La race Sebright est une race naine, au dos court, avec une poitrine large en proportion, des ailes pointant vers le bas, une crête frisée (comprimée horizontalement, de manière à recouvrir partiellement la tête et recourverte de petites boursuflures plus ou moins grosses) et un plumage, argenté, doré ou citronné, dont chaque plume est soulignée par un liseré. Créée vers 1810, en Angleterre, par Sir John Saunders Sebright, il s'agirait de la première race dont la création, pour l’ornement, a été contrôlée par les humains. Darwin citera à plusieurs reprises cet exemple de sélection dans ses ouvrages, dont Variation of Plants and Animals Under Domestication en 1868.
Poule Sebright et poussins à gauche, coq Sebright à droite
La "Vedette", produit de la recherche agronomique française
A l'issue de la seconde guerre mondiale, la plupart des cheptels de poules des races traditionnelles ont été décimés. Elles sont remplacés par des souches industrielles provenant principalement des USA, élevées de façon intensive.
En France, des firmes privées développent elles aussi peu à peu le croisement systématique de coqs et de poules de races différentes. En 1968, la poule Vedette, également produite industriellement, est mise sur le marché pour répondre aux besoins du marché. Cette production est directement issue d'études de l'INRA sur les effets de gènes individuels sur des performances recherchée, ici la chair. Naines (poule Vedette à gauche sur la photographie, à côté d'une poule de taille ordinaire à droite), par la mutation d'un gène impliqué dans le phénotype taille, lié au sexe, l'allèle dw récessif, elles sont moins chères à nourrir (de 20 àn 25 %) et, par croisement avec des coqs de taille ordinaire (des coqs de la race Cornish), elles donnent naissance à des poulets de taille ordinaire,qui, par ailleurs, croissent rapidement. Privilégiée par les éleveurs, cette création agronomique française a rapidement été à l'origine des trois quart des poulets de chair industriels consommés en France !
Aujourd'hui
Bien que des races anciennes persistent, beaucoup d'entre elles ont subi une diminution importante de la taille de leurs populations et, par conséquent, de leur diversité génétique. Les risques, sanitaires notamment, les rendent très vulnérables or les perspectives qu’offrent certaines races traditionnelles de par leurs génotype et phénotype pourraient être valorisée. Leur conservation fait désormais l'objet de toutes les attentions. Des efforts d'inventaire, d'évaluation et de préservation se poursuivent grâce à des éleveurs de tous types, amateurs, professionnels, écomusées, l’INRA et la Société Centrale d'Aviculture de France.
Pour en savoir plus / Propositions d'exploitations pédagogiques
Principales sources
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Émission La Maison Lumni, des cours - Collège De l’œuf à la poule, des poules aux œufs :
https://www.lumni.fr/video/de-loeuf-a-la-poule-des-poules-aux-oeufs-5-juin - Fiche de l'émission dont chapitrage détaillé sur le portail national des SVT
https://eduscol.education.fr/svt/actualites/actualites/article/les-cours-lumni-college-en-svt-sont-disponibles-chapitres.html - J.-J. Perrier, La poule, domestiquée par une mutation ? Pour la science, 5 avril 2010
https://www.pourlascience.fr/sd/zoologie/la-poule-domestiquee-par-une-mutationnbsp-10531.php - J.-M. Larivière, P. Leroy, Conservation et valorisation de la diversité des ressources génétiques du poulet en Europe : initiatives et perspectives, Ann. Méd. Vét., 2008, 152, 203-220
- Terminologie de différents repères de l'anatomie externe des volailles.
- Pour les propositions d'activités :
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B. Sauveur, Alicja Zybko, B. Colas, Maryse Garreau, J. Rocard. Protéines alimentaires et qualité de
l’oeuf. I. – Effet de quelques protéines sur la qualité interne de l’oeuf et les propriétés fonctionnelles.
Annales de zootechnie, INRA/EDP Sciences, 1979, 28 (3), pp.271-295. hal-00887880 -
P. Merat. Gènes majeurs chez la poule (Gallus gallus) : autres gènes que ceux affectant la taille (1).
INRA Productions Animales, Paris: INRA, 1990, 3 (5), pp.355-368. hal-00895918 -
J.C. Fotsa and al. Caractérisation phénotypique des populations de poules locales (Gallus gallus) de la zone forestière dense humide à pluviométrie bimodale du Cameroun, Animal Genetic Resources, 2010, 46, 49–59. © Food and Agriculture Organization of the United Nations, 2010 doi:10.1017/S207863361000069X
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Pistes d'exploitation pédagogique
- Les aliments, leur conservation et leur transformation
- La classification phylogénétique
- Les stades de développement
- La biodiversité
Exemples d’activités intégrées à un scénario pédagogique (cycles 3 et 4)
- Les oeufs, un aliment (cycle 3)
Énoncé version Énoncé version - La biodiversité des animaux de la basse-cour (cycle 3)
- Des relations génotype/phénotype chez des coqs et des poules (cycle 4, exploitable en Seconde)
Énoncé version Énoncé version
Liens sciences / société
Articles et vidéos de médias scientifiques, généralistes ou de sites associatifs
- Michaël Seigle, De l’Asie à la Méditerranée à pas de poule, septembre 2018
https://archeorient.hypotheses.org/9236 - Pierre Sellier, Didier Boichard et Etienne Verrier, « La génétique animale à l‘INRA », Histoire de la recherche contemporaine, Tome VIII-n°1 | 2019.
http://journals.openedition.org/hrc/3222 ; DOI : https://doi.org/10.4000/hrc.3222 - Un conservatoire des animaux de la basse-cour : https://www.youtube.com/watch?v=yM6E5DYHVGM