LA BIBLIOTHÈQUE DE CLASSE, QUEL CONSTAT ?
Le bibliothèque (étymologiquement "le dépôt de livres") est un coin que l’on retrouve dans une très grande majorité des classes. Le contenu de cet espace a parfois été impacté par le dédoublement des niveaux de GS, CP et CE1: les effectifs divisés par deux induisent aussi un partage d’une bibliothèque. Aujourd’hui, les bibliothèques sont pour la plupart renflouées par des livres récupérés en seconde main, ou achetés dans le cadre des commandes ou des projets de classe depuis quelques années.
Pour une grande majorité des coins bibliothèques, c’est un espace déjà présent dans la classe au moment de votre arrivée. Vous y avez peut-être apporté des modifications (vous avez changé de meuble, pensé un aménagement particulier, ou vous avez fait le tri dans les livres…), et l’utilisez dans des contextes variés (pendant le quart d’heure de lecture, ou quand vos élèves ont terminé un travail…). Toutefois, c’est aussi un espace que nous avons du mal à faire vivre, à fréquenter, à organiser et à maintenir bien rangé au long de l’année. Nos élèves, spécifiquement ceux qui n’ont pas l’habitude de fréquenter des livres, ont des difficultés à apporter le soin et l’attention que nous voudrions aux ouvrages de la classe.
Les entrées dans la lecture sont variables, et les chemins à arpenter sont nombreux et conséquents. Vous l’avez particulièrement explicité si vous mettez en place le projet de lecteur (voir l’article dédié). Nos élèves de REP sont plus nombreux à voir l’entrée dans l’écrit avec un usage plus fonctionnel et utile au quotidien. Paradoxalement, les supports écrits que nous proposons à nos élèves demeurent peu variés (albums, documentaires, contes, quelques romans pour les classes d’élémentaire), car nous souhaitons maintenir un niveau culturel élevé pour nos élèves.
OÙ COMMENCER POUR INVESTIR LA BIBLIOTHÈQUE DE CLASSE ?
Le point d’entrée privilégié reste le réel. Le premier chantier consiste à aborder avec nos élèves ce qui existe déjà dans la classe. Les élèves peuvent commencer à manipuler les livres, non pas pour lire, mais pour observer « l’objet-livre », et identifier des caractéristiques communes (présence d’écrit, titre, auteur, couverture, dos…) et des caractéristiques dissemblables (longueur d’écrit, présence/absence d’illustration…), qui permettront de faire émerger les premières catégories.
Ces catégories seront affinées et précisées avec l’importance attachée non plus à la forme mais au contenu (et donc une introduction aux fonctions de l'écrit). Ainsi, vos élèves sépareront rapidement les livres « pour raconter des histoires » (albums) et les livres « pour apprendre des choses » (documentaires). Toutefois, ces deux catégories, très présentes dans les écoles, ne sont qu'une faible représentation de la variété des écrits accessibles pour nos élèves.
QUE METTRE DANS LA BIBLIOTHÈQUE ?
Nos bibliothèques doivent maintenir un niveau culturel élevé, en proposant des écrits que nos élèves peuvent parfois ne pas rencontrer ailleurs que dans leur classe. Toutefois, il peut être intéressant de concevoir la bibliothèque de classe comme l’endroit où l’on trouvera de l’écrit (au sens large), en proposant une variété de supports à catégoriser. La variété n'est pas confiscatoire d'un niveau culturel ambitieux pour nos élèves.
Voici quelques exemples d’écrits intégrables dans une bibliothèque de classe:
- des catalogues (reliquat de vos catalogues de commandes restés en salle des adultes, catalogues de jeux et jouets, vêtements...) ;
- des plans (cartes routières, plans de métro, carte de Paris, de France…) ;
- des modes d'emploi et plans de construction ;
- des règles de jeux (copie de vos règles de jeux de société de classe, de vos ateliers, …) ;
- des magazines, des journaux (abonnements de classe…) ;
- des écrits argumentatifs (publicités, affiches, prospectus, …) ;
- des livres de cuisine, des menus de restaurant ;
- des écrits rhétoriques variés (textes de théâtre, paroles de chansons, recueils de poésie…) ;
- des livres d’arts (programmes d’expositions, guides de visite, livres photos…) ;
- des courriers (cartes postales de vos élèves pendant les vacances, correspondances…) ;
- des livres-jeux (petites enquêtes policières, ouvrages type « cherche et trouve »…) ;
- des manuels (spécimens reçus lors des commandes…) ;
- des écrits explicatifs (petites annonces, compte-rendus de conseil de classe, communications aux familles...) ;
- autres...
Ponctuellement, il est aussi possible d’extraire de vos catégories des ouvrages qui correspondent à un projet, et ainsi passer d’une catégorie par type d’ouvrage à une catégorisation basée sur le contenu. Cela permet d'aborder le travail des supports en réseau.
Chaque livre annoté et catégorisé trouve une place dédiée dans la bibliothèque. L'espace est ainsi structuré et organisé, tout en restant accessible pour les élèves.
QUELS AVANTAGES NOTABLES ?
Vos élèves investissent davantage la bibliothèque de classe. Le travail amorcé avec l’explicitation permet de changer la perception de nos élèves et la nôtre. D’un espace de délestage occupationnel, la bibliothèque de classe redevient vivante et porteuse de sens, agréable à fréquenter.
Le présence de supports d’écrits fonctionnels vous permet d’alimenter sur le long terme votre projet de lecteur, et de réduire l’écart ressenti par nos élèves (encore) non sensibilisés à la lecture narrative.
Vos élèves développent leur autonomie dans la gestion de cet espace. Sur la forme, ils sont davantage responsabilisés dans l’organisation et le rangement au quotidien. Ils conscientisent le soin à apporter à l’objet livre, tant dans sa manipulation que dans son rangement. Sur le fond, vos élèves sont davantage en mesure de pouvoir chercher et trouver une information ou un contenu.
Votre bibliothèque évolue ! En fonction de vos élèves, de leurs progrès, de vos projets et de vos trouvailles, votre bibliothèque pourra être entièrement renouvelée toutes les périodes, tous les trimestres, semestres ou chaque année.
Question ouverte pour alimenter la réflexion lancée: la bibliothèque de classe, rassemblant une telle variété d'écrits, conserve-t-elle le nom de "bibliothèque"...?
QUALITÉ OU QUANTITÉ ?
Les bibliothèques surchargées sont bien trop souvent inaccessibles pour nos élèves, qui gravitent régulièrement autour des mêmes livres, et mettent du temps à choisir le livre qu'ils souhaitent lire ou regarder. Mieux vaut débuter l’année avec un nombre plus restreint d’ouvrages, et alimenter régulièrement avec de nouveaux livres, en fonction des progrès des élèves et des projets menés.
Avoir peu d'ouvrages n'empêche pas de proposer de nombreuses catégories, pour acclimater nos élèves à différentes fonctions de l’écrit. Nous les aidons à nourrir un questionnement autour du choix, en prenant le temps de trouver les réponses à ce questionnement. Ils développent ainsi leur identité de lecteur.
"Il est très important que les enfants puissent choisir des livres. Non pas choisir seulement comme on l'entend souvent à partir d'une très grande diversité, dans des lieux très fournis. Mais choisir parmi quelques livres, dans la classe, dans un rangement très clair." (extrait de Première maîtrise de l'écrit - Mireille Brigaudiot).
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