Migrant'Scène

La classe média a participé au Festival Migrant'Scène en partenariat avec la CIMADE et la Maison des Métallos :

http://www.festivalmigrantscene.org/novembre-i-maison-des-metallos/


​Les élèves ont travaillé avec le journaliste David Eloi et ont appris les rudiments de l'écriture journalistique. En classe, nous avons préparé un questionnaire puis les élèves ont rencontré des personnes immigrées pour les interviewer. Ils ont ensuite écrit leurs portraits dans un style journalistique.

Dans un deuxième temps, ils ont ont travaillé avec la comédienne et auteur Leïla Anis pour l'écriture de portraits fictionnels de ces personnes immigrées.


​Voici les portraits rédigés avec l'aide du journaliste David Eloi:

Portrait de David B par Anna
​​
​« Aujourd’hui, je suis heureux en France ». La vie de David B., 47 ans, n’a pas toujours été rose mais il peut le dire aujourd’hui. Il est marié depuis peu avec Catherine G. Ensemble ils ont cinq enfants.
D’une famille originaire du Burkina-Faso, David est né en Côte d’Ivoire en 1970. Aîné d’une fratrie de 11 frères et sœurs, il se devait d’aider ses parents. "J’alternais entre les études et le travail pour subvenir aux besoins de ma famille” explique t-il. Il a donc voulu arrêter les études à 22 ans pour avoir un travail à temps plein, mais ses parents l’ont obligé à continuer. Il devait pourtant en trouver un afin d’aider sa famille car les deux parents seuls ne pouvaient pas subvenir aux besoins de tous. Alors, David choisit de quitter son pays pour la France. Un choix plutôt facile pour David. "Qui ne choisirait pas la France ? ”, demande-t-il, c’était une évidence pour lui. “Je savais que si je réussissais à avoir mes papiers, je pourrais continuer mes études et avoir un bon travail et des revenus suffisants afin d'aider ma famille”. A cette époque, en 1995, en Côte d’Ivoire, tout le monde parlait de la France. Pour les grands du quartier, il y avait beaucoup d’emplois là-bas. Cependant ça n’a pas été facile d’obtenir un visa valide pour venir légalement en France. Après plusieurs mois d’attente et beaucoup de versement d’argent à l’administration, il a enfin pu accéder à la France avec un visa tourisme. A son arrivée, David vit dans une maison avec quelques amis qu’il connaissait depuis la Côte d’Ivoire.
Deux mois après son arrivée, son visa est périmé. Il trouve un travail non déclaré. Grâce à ce travail il a pu régulièrement envoyer de l’argent à ses parents. Trois ans après son arrivée, il fait la rencontre de Catherine, immigrée elle aussi du Cameroun. Ensemble ils ont leur premier enfant. Grâce à lui, ils ont enfin pu avoir un titre de séjour de cinq ans en l’an 2000. Lorsque la carte de séjour a été  périmée, David a mis en place une démarche afin d’avoir la nationalité française. “Les démarches pour obtenir la nationalité française ont été très compliquées. A un moment j’ai pensé que je n’aurai jamais ces papiers j’ai même pensé à tout abandonner.” Après plus de neuf mois de démarches, fin 2005, David devient enfin un citoyen français. “Aujourd’hui je ne suis plus un immigré, je suis désormais un homme français”. David a donc repris ses études : “J'étais très heureux et impatient de pouvoir enfin reprendre et finir mes études dans ce pays”. Aujourd'hui il travaille à l'aéroport Charles De Gaulle en tant que dirigeant administratif. David a une vie plutôt agréable et il dit aimer sa nouvelle vie en France.  “Je me sens bien, j’ai mis du temps à m’habituer avec le froid, le travail etc., mais aujourd'hui j’y vis avec ma famille et j’aime ce pays”. Toutefois il retourne souvent en Côte d’Ivoire. “Quand je vais en Côte d’Ivoire j’ai plaisir à retrouver tout le reste de ma famille, je retrouve mes amis d'enfance et j’aime cette ambiance.” D’ailleurs David a confié qu'après avoir pris sa retraite il retournera en Côte d’Ivoire “je suis né là-bas, j’ai grandi là-bas donc bien sûr qu’un jour je retournerai sur ma terre d'origine ”.


​Portrait d'Assa M. par Radi

​​« A l’âge de 16 ans, mon père a donné ma main à un homme plus âgé que moi sans mon consentement », raconte Assa D., une jeune femme de 23 ans, mère de trois enfants. Assa a eu une enfance calme et joyeuse auprès de ses parents et ses cinq frères et sœurs : « Je me souviens, quand j’étais petite, avec mes cousines, nous allions chercher de l’eau au puits de mon village. En route nous rigolions et chantions. Nous étions encore innocentes ».
Quelques années plus tard son père a décidé de la marier de force : « Il m'a convoqué au salon pour m’annoncer que j’allais me marier ». C’est à ce moment-là que, pour la première fois, elle a eu l’idée de partir. Mais si elle a finalement accepté de vivre aux côtés d’un homme qu’elle n’aimait pas c'était pour éviter à sa famille d'être mal vue par le reste du village. Dans la coutume de son village, c'est très mal vu lorsque une femme conteste la décision de son père ou la refuse. Son père aurait perdu son "honorabilité". Assa et son mari ont eu deux enfants ensemble. « cinq, six ans plus tard, cet homme est décédé. Mon père a voulu me remarier de force et c’est là que j’ai décidé de partir. »
Elle paie un passeur pour traverser la mer Méditerranée sans ses deux enfants qu'elle confie à sa sœur aînée. Elle avais le cœur serré de devoir laisser ses enfants mais elle avait  l'espoir d'avoir une nouvelle vie et de pouvoir les récupérer un jour. « La traversée était longue. Il faisait froid, nous étions nombreux  sur le bateau. Il y avait beaucoup d’hommes et quelques femmes avec de jeunes enfants dans leurs bras. Nous étions quasiment les uns sur les autres », dévoile Assa l'air pensif.
A son arrivée en France le 15 mai 2016 , elle a été immédiatement prise en charge par le 115. Six mois après son arrivée, elle a  rencontré un homme originaire comme elle du Burkina Faso. « Nous avons eu un enfant, né le 2 aout 2017. » Actuellement elle fait des démarches pour avoir les papiers français et s’installer en France légalement.
 Ces démarches lui prennent du temps : "Quelquefois quand je me rends aux rendez-vous, nous attendons des heures dans le froid avant de pouvoir être pris en charge." Lors des rendez-vous, les dialogues sont difficiles car Assa ne comprend que peu la langue française et elle ne sait ni lire ni écrire. Malgré les difficultés liées aux démarches, elle a l'espoir qu'un jour elle pourra avoir ces papiers et qu'elle pourra ramener ses deux enfants en France, ce pays où elle se sent bien. "En France les gens sont généreux. Je suis arrivée sans rien et dès le premier jour on m'a offert un toit pour dormir, de quoi me nourrir et des vivres. C'est un magnifique pays d'accueil " dit Assa.
« J’envoie régulièrement de l’argent au Burkina pour mes enfants restés au pays. Mon seul regret est de ne plus pouvoir serrer mes enfants dans mes bras chaque jour. Tout ça est bientôt fini car, dès que j'aurai mes papiers Inch'Allah je ferai tout pour faire venir mes enfants ».



​Portrait d’une immigrée portugaise par Cindy

« Je pense qu’un jour j’y retournerai… »
Mme Elsa D. est une femme, d'origine portugaise, vivant dans le 13  ͤ arrondissement de Paris. Le 6 Novembre 2017, elle a acceptée de répondre à un interview, afin d'expliquer pourquoi elle a immigrée et pourquoi elle a choisi comme pays d'accueil la France. Dans son appartement, de nombreux objets rappelaient son pays natal, le Portugal, comme par exemple, des photographies de sa ville natale ou des trois bergers qui disent avoir vu la Vierge Marie. Il y avait également des cartes postales montrant différents lieux au Portugal, ainsi que le coq de Barcelos qui est l'un des emblèmes les plus connu du Portugal.
En Mai 1992, Mme D., alors âgée de 24 ans a quitté son pays natal le Portugal, pour une meilleure vie en France plus précisément à Paris.
En effet, Mme D. comme d'autre portugais, a décidé d'immigrer du Portugal vers la France pour échapper à la crise qui avait éclatée après la dictature de Salazar. Durant la dictature et la guerre coloniale, les pays qui faisaient partie du territoire portugais, comme l'Angola et la Mozambique, ont gagné leur indépendance, créant comme conséquence, une grande chute de l'économie portugaise. Celle-ci était principalement basée sur les revenues des colonies.
Elle s'exprima de façon nostalgique: "la dictature d'Antόnio de Oliveiro Salazar et la guerre coloniale ont détruit la vie d'un bon nombre de portugais rendant ainsi la vie pleine de misères".
Elle a reprit ses esprits au bout de quelque minutes, et a continué de raconter son récit. Elle a expliqué que son voyage a été assez compliqué vu que celui-ci s'est déroulé en autocar et qu'il a duré 24 heures.
Arrivée en France, elle a expliqué combien c'était dur de s'intégrer dans un pays qu'on ne connaissait pas, avec en plus une langue totalement différente. Pour réussir à s'intégrer, elle a raconté  qu'elle avait  fait la connaissance d'une femme de ménage d'origine portugaise. Cette femme l'a aidée à améliorer de manière considérable son niveau en français
Après cela, elle a expliqué que la France fut pour elle un moyen de ne dépendre de personne et de s'envoler de ses propres ailes. La seule chose qu'elle dit regretter, c'est d'être aller dans un pays qui était très différent comparé à son pays natal "Mon pays sera toujours le Portugal  peut importe où je vis, c'est un fait que personne ne pourra jamais changer...". Après ces deux phrases deux émotions se sont lu sur son visage, la nostalgie et la détermination.
Pour ne pas se sentir seule et oublier ses racines, elle raconte comment elle avait décidé de décorer son appartement avec des objets lui rappelant son pays par exemple: des photographies, le coq de Barcelos,  manger régulièrement de la nourriture traditionnelle et de faire en sorte de transmettre certaines valeurs à ses deux filles, afin qu'elles sachent d'où elle viennent et qui elles sont.
Pour elle, la France n’est et sera seulement qu’un pays qui l’a aidée à être ce qu’elle est maintenant, mais elle ne cesse de répéter qu’un jour ou l’autre elle retournera à ses racines.

« Un jour ou l’autre, je retournerai à mes racines. »


​Portrait de Maria P. par Rebeca

« Curitiba, là d’où je viens, est une ville du sud du Brésil. Il y fait très froid pendant l’hiver. Mais en France, j’ai l’impression que l’hiver dure beaucoup plus longtemps qu’au Brésil », déclare, très souriante, Maria P.
Elle habite en France depuis 6 ans, elle est venue en France en 2011. Elle a décidé de quitter son pays (le Brésil) pour rejoindre son copain français avec qui elle s’est mariée en Juin 2011. Elle a connu son mari à travers une amie que les a mis en contact par internet. Mais au début ils se parlaient seulement par mail par téléphone ou par appel vidéo avant de se connaitre au Brésil. Son mari avait l'habitude de partir en vacances au Brésil car ses frères et leurs familles respectives habitent au Brésil. Parmi ses frères,  5 habitent au Brésil et les autres sont éparpillées en Suisse et au Portugal. Avant de la connaitre il a habité pendant 10 ans au Brésil, cela lui a permit de apprendre le portugais. La première fois qu'elle est venue en France c'était a la fin de 2010. Elle avait son travail comme infirmière à Curitiba, et lui comme commerçant à Paris. " Entre lui avec son commerce et moi comme infirmière, nous avons décide que la France pouvait nous donner plus "d'assurance" , pour la qualité de vie, et de sécurité". Maria a laissé ses deux filles au Brésil, l'aînée qui était déjà mariée et la plus jeune de 11 ans. Pendant 4 ans la plus jeune est restée avec l'ainée, "J'ai dû faire un dur choix de laisser ma fille de seulement 10 ans avec ma fille ainée , même si j'allais la voir 2 ou 3 fois par an".  Maria a eu son titre de séjour après son mariage.
La peau mate, les cheveux noirs, un grand sourire, Maria est une femme qui voit la vie de la meilleure façon. Même dans les difficultés, elle voit une opportunité d’avancer, elle est déterminée dans ses objectifs. L’une des difficultés qu’elle a rencontrées est la langue. Elle parle français mais a encore des difficultés pour s’exprimer. Maria a fait des cours de français jusqu’à avoir son diplôme B2 de français, mais comme Maria parle portugais avec son mari elle a eu dû mal a se développer dans la langue, même ses copines étaient brésiliennes, "Heureusement, les français n'ont jamais eu des problèmes pour me comprendre, le seul problème que j'ai, c'est que je parle doucement." "Dans mes démarches administratives mon mari m'accompagne toujours"
En ce moment elle refait ses études d’infirmière car son diplôme brésilien n’est pas valable en France. " Par rapport a mes études j'ai dû tout recommencer, car la France ne valide pas mon diplôme, c'est dur de réaliser que je dois tout refaire, mais bon, je dois m'intégrer où je suis. Retourner a l'école après plus de 15 ans dans ma domaine c'est difficile, à mon avis la France devrait reconnaitre des diplômes étranges , dû a cela j'ai resté 5 ans sans travail, aujourd'hui je me retrouve dans une école de préparation pour le concours d'infirmière, cela m'aide aussi à travailler mon français" .
"La qualité de vie en France est très supérieure à celle de mon pays." Maria raconte les difficultés que son pays est en train de traverser, une crise politique, crise financière, une présidente renversée, etc. Maria dit « Si je n’avais pas quitté le Brésil en 2011, j’aurais de toute façon fini par le quitter à cause des problèmes sociaux et économiques que le pays affronte, des dangers dans les rues, de l’insécurité pour le peuple. »


Portrait de Chantal M. par Océane

​«  En Turquie nous avons été maltraités, humiliés et traités comme des esclaves. Notre voyage ne s’est pas passé comme je l’imaginais » Il y a 19 ans, Chantal M. a quitté la République Démocratique du Congo, son pays natal, pour s’installer en France avec sa sœur aînée. Chantal et sa sœur sont albinos. C’est à cause de leur couleur de peau qu’elles ont été abandonnées par leurs parents quand elles étaient des bébés. A l’époque, les albinos étaient très méprisés. Ils étaient la cible de discriminations, vexations, insultes et parfois de violence physique à cause de ce gène qui prive la peau, les yeux et les cheveux de mélanine, une protection essentielle contre le soleil. Certains parents abandonnent leurs enfants albinos car ils sont considérés comme étant “maudits”. Au Congo, elles ont vécu une vie très difficile et compliquée, car depuis l’abandon de leurs parents elles n’avaient rien pour vivre. Chantal n’a pas voulu expliquer comment elle a survécu pendant toutes ces années: « Nous voulions avoir une vie meilleure […] nous n’avions plus rien pour vivre ». Être seules et sans parents était une épreuve très difficile pour elles. Chantal et sa sœur devaient s’entraider pour pouvoir avancer. Elles n’en pouvaient plus de rester là, seules et sans argent alors elles ont décidé de partir en France.
Pour aller en France, elles devaient passer par la Turquie avec des passeurs : ”On les paie et ils nous emmènent en Europe”. Chantal et sa sœur devaient se procurer de l’argent afin de payer leurs billets d’avion pour la Turquie et elles devaient aussi se procurer de l’argent afin de payer les passeurs pour aller en Europe. Elles ont dû travailler dur afin de gagner beaucoup d’argent. Par exemple, elles ont travaillé pour des familles en faisant le ménage. Elles ont vendu certaines de leurs affaires afin de gagner suffisamment d’argent : “Nous avons beaucoup travaillé dans la difficulté et dans de mauvaises conditions”. Le trajet pour aller en Europe était très difficile et très dangereux: “Nous étions une centaine dans une seule barque, il y avait des enfants, des familles:  le voyage ne s’est pas passé comme je l’imaginais”. Arrivées en France elles n’avaient pas d’hébergement et ont dû rester dehors plusieurs jours dans le froid. Certaines personnes leur disaient d'appeler un numéro afin de trouver un hébergement pour quelques nuits dans un foyer. Elles ont pu commencer leurs démarches administratives en France. Chantal a accepté de me raconter son histoire à la fois douloureuse et dure mais qui a fait d’elle aujourd’hui une femme forte. « Aujourd’hui je suis une femme épanouie en France et heureuse.»



Portrait de Maria Manuela D. par Lucie

​«Mes parents m'ont caché dans les toilettes mais quand on est passé dans un tunnel, par peur j'ai crié et pleuré», raconte Maria Manuela D., 54 ans, gardienne d’immeuble à Paris. Elle a quitté le Portugal pour y retrouver de la famille en 1971 pendant la dictature de Salazar qui a duré 41 ans et qui est la plus longue d’Europe. C'était une dictature conservatrice et nationaliste qui s'appuyait sur l'armée, l'Eglise catholique et la police secrète et militaire. Elle avait 9 ans. Avant de venir en France elle vivait à Lisbonne au Portugal mais ses parents on voulut trouver une vie meilleure en quittant leur pays.
« On a dû faire un crédit pour acheter des billets de train pour passer la frontière, mais seuls les adultes pouvaient partir avec une autorisation de passer des vacances dans un autre pays. Mes parents m’ont donc caché dans les toilettes », en passant dans un tunnel « par peur, j’ai crié et pleuré. » Ses cris attirent l’attention des contrôleurs.« Après m’avoir sortie des WC en me tirant le bras, l’un des deux hommes a demandé "à qui est cette enfant?" J’étais tétanisée et tout le monde me fixa en me dévisageant. » Quand ses parents se sont manifestés, les hommes «m’ont jeté sur mon siège et nous ont ordonnés de descendre au prochain arrêt. Ma mère me demanda, paniquée et inquiète, comment ils m’avaient trouvé alors je leur ai expliqué ce qui c’était passé.» Quand les contrôleurs sont venus voir les passagers qui étaient entré, ils ont remarqué que Manuela et ses parents étaient toujours là alors que le train était déjà reparti. Les deux mêmes hommes se sont approchés d’eux et les ont mis en garde. « L’un des deux nous a dit: n’espérez pas rester encore un arrêt de plus ! Et pendant tout le trajet les deux hommes ne nous ont pas lâchés du regard.» Quelques heures plus tard, quand le train s'est arrêté, les deux contrôleurs se sont levés de leurs sièges et ont avancé avec rapidité vers eux. Tous les trois s’étaient levés et sont descendus du train sans rien dire avant qu’ils soient jetés dehors. Après qu’ils aient acheté de nouveaux billets pour passer la frontière, ils sont rentrés avec des passeurs sans se faire prendre. Ils ont continué le trajet à pied pendant plusieurs heures en passant dans de hautes herbes. Ils dormaient dans des hôtels insalubres et ne pouvaient pas y rester deux jours de suite car cela leur couteraient trop cher et ils prendraient encore plus de temps à arriver. « Quand je suis arrivée, ça n’a pas été évident. A neuf ans je n’étais déjà plus une enfant. Je suis vite devenue adulte à cause d’obligations, je devais m’occuper des papiers administratifs car mes parents ne parlaient pas et ne comprenaient pas le français. On m’a inscrite en CE2 alors que j’aurais du être en CP pour avoir les bases, donc j’avais deux ans de retard sur les autres élèves de mon âge. J’étais la plus grande mais je ne parlais pas un mot de français. Puis c’est venu au fur et à mesure, à cet âge-là, tu apprends vite. Mon père, lui, a trouvé facilement du travail dans le bâtiment.» A l’époque, la France avait besoin de main d’œuvre et « il était chef de chantier au Portugal. Ma mère qui tenait une épicerie à Lisbonne est devenue femme au foyer. Jusqu’à mes quarante ans j’allais tous les ans en vacances au Portugal et depuis je n’y suis pas retournée. Au début, je regrettais d’être venue parce que le Portugal était mon pays, mais maintenant mon pays c’est la France.»