Lycée Charlemagne

Petit historique du lycée Charlemagne

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De l'époque mérovingienne au XXIème siècle, voici l'histoire du lycée Charlemagne résumée en quelques pages et articulée autour de quatre grandes époques :

  • D'un marais au Marais
  • L'ère des jésuites
  • Le départ des jésuites et la Révolution
  • De l'école centrale au lycée Charlemagne
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L'urbanisation du quartier Saint-Paul remonte à l'époque mérovingienne. Dans une zone marécageuse, ancien cours de la Seine, traversée par une voie romaine conduisant à Meaux - l'actuelle rue Saint-Antoine -, Saint-Éloi, ministre de Dagobert 1er construisit en 630 une basilique dédiée à Saint-Paul-de-Tébaïde, ruinée en 845 par les Normands.

Appelé « Culture Saint-Éloi », puis village Saint-Paul, le hameau se développe lentement durant le haut Moyen-Âge.

Lorsque Philippe Auguste, partant pour la croisade, décide entre 1190 et 1209 la construction d'un rempart protégeant sa capitale, il lui fait traverser la paroisse Saint-Paul.Cette enceinte, dont un spectaculaire fragment domine depuis 1946 le terrain de sport du lycée, ne sera jamais détruite mais littéralement absorbée par le quartier qui se développe autour de l'église Saint-Paul-des-champs.

La façade du lycée donnant sur la cour d'honneur garde le plan et l'alternance de murs et de tours : l'escalier d'honneur est construit sur l'emplacement d'une de ces tours.

Sous le règne de Charles V (1337-1380) le village Saint-Paul est promu au statut de quartier noble. Le roi, évitant son château du Louvre devenu dangereux pour lui, s'installe dans un ensemble d'hôtels particuliers qu'il aménage en un Hôtel Saint-Paul, véritable palais royal. D'autres demeures nobles se construisent aux abords de la résidence royale : l'Hôtel des Marmousets construit en 1384 propriété du duc d'Orléans, frère de Charles VI le Fol, et l'Hôtel de La Rochepot, propriété de la famille de Montmorency. histo 12

Le 15 août 1534, Ignace de Loyola fonde à Montmartre La Compagnie de Jésus, autrement appelée ordre des jésuites. Les jésuites s'imposent très rapidement dans deux domaines : l'œuvre missionnaire et l'enseignement. En 1560 ils obtiennent le droit de s'installer à Paris et fondent en 1564 le collège de Clermont (l'actuel lycée Louis-le-Grand).

En 1580, l'Hôtel de La Rochepot est mis à leur disposition pour en faire leur « université » et la demeure des profès(*) : la Maison professe de la rue Saint-Antoine est née. Ils édifient une chapelle dédiée à Saint-Louis, qui sera remplacée dans la première moitié du XVIIè siècle par un des rares exemples parisiens du baroque jésuite, inspiré de la Chiesa del Gesù de Rome : l'église Saint-Louis qui deviendra Saint-Paul Saint-Louis lors de la démolition de l'église paroissiale Saint-Paul des Champs en 1799).

L'église, une des plus richement ornée et meublée de Paris, devient un centre intellectuel important de la capitale : Bourdaloue et surtout Bossuet y prêchent, Marc Antoine Charpentier y donne sa musique.

De la demeure d'origine qui constituait le logement du Père général de la Maison professe ne subsiste qu'un petit bâtiment qui abrite aujourd'hui l'intendance du lycée et des appartements de fonction.

En 1629, les jésuites acquièrent l'hôtel du Porc-épic, qu'ils transforment pour se loger, eux et leurs hôtes. L'ensemble devient « le couvent des Grand Jésuites ». Ce bâtiment, à quelques modifications près est celui qui constitue le corps central du lycée actuel.

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Une première fois expulsés après une tentative d'assassinat sur la personne du roi Henri IV en 1594 par un de leurs anciens élèves, les jésuites reprennent possession de leurs biens en 1604 selon le désir du Roi. La tradition s'impose alors que le confesseur du roi soit membre de la « compagnie ». Un des directeurs de conscience de Louis XIV, qui vécut dans la Maison professe, porte un nom cher aux parisiens : le père de La Chaize.

La Maison professe n'a rien d'une austère abbaye, et les jésuites lui donnent une somptueuse décoration dont il ne reste hélas que peu d'éléments. Giovanno Gherardini réalise la fresque de la grande bibliothèque et le plafond de l'escalier d'honneur. La rénovation du lycée en 1994 a permis de mettre au jour certains vestiges de ce décor, notamment un joli plafond à poutres peintes dans une salle de cours et des fragments de la fresque du plafond de la bibliothèque. histo 24 

(*) on désigne par « profès » le jésuite qui ajoute à ses vœux celui d'aller là où le pape l'envoie et de renoncer à toute fonction ecclésiastique.

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Si le XVIe et le XVIIe siècle marquent la période faste de l'histoire des jésuites en France et donc de la Maison Professe, le XVIIIe sera celui de la disparition de l'ordre. En 1764 Louis XV, suivant un arrêt du Parlement de Paris, les proscrit de France.

La Maison Professe est alors plus ou moins abandonnée jusqu'en 1767, date à laquelle l'ordre des Génovéfains s'installe dans les vastes locaux du « couvent des grands jésuites ». La révolution chasse ces derniers religieux du lieu.

Le 7 ventôse an III (25 février 1795), la convention, sous la férule de Lakanal, décide de créer trois écoles centrales, dont une dans les locaux de la Maison Professe de la rue Saint Antoine. La pédagogie fait son retour sur le site le premier brumaire an VI (22 octobre 1797) et ne le quittera plus. histo 32

Dans son œuvre administrative, la révolution crée un cycle d'études laïc inspiré des théories des Lumières, qui exclut la religion et la morale, permet aux élèves le choix de leur cours, inclut les sciences dans les cursus et ne fait plus des langues anciennes le pivot de l'éducation. Cette liberté n'est pas du goût de tous et la première querelle des anciens et des modernes de « l'éducation nationale » éclate.

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Le Premier Consul Bonaparte réorganise les études dans une loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) et crée les Lycées, un par département et quatre à Paris : le lycée Napoléon (Henri IV), le lycée Bonaparte (Condorcet), le lycée impérial (Louis-le-Grand) et le Lycée Charlemagne.

« On enseignera dans les lycées les langues anciennes, la rhétorique, la logique, la morale, et les éléments des sciences mathématiques et physiques. Il y aura, dans les lycées, des maîtres d'études, des maîtres de dessin, d'exercices militaires et d'arts d'agrément. » (loi du 11 floréal an X).

Le décret organique du 17 mars 1808 stipule que les études au lycée seront sanctionnées par un examen, premier grade universitaire : le baccalauréat.

La vie des lycéens est organisée autour de l'internat. Cependant ni le Lycée Charlemagne ni le Lycée Bonaparte (Condorcet) n'en sont pourvus. Les élèves provinciaux, que la renommée des établissement de la capitale attirent se voient contraints de trouver un hébergement extérieur à l'établissement dans des institutions (sorte d'internats privés où les élèves sont hébergés et où les cours sont « répétés ») : la plus importante d'entre elles, l'institution Massin, légua à sa fermeture le bronze de Silène et Dionysos érigé au chevet de l'église Saint-Paul Saint-Louis. histo 42

Il serait vain de citer le nom de plus de 80 000 élèves ayant usé les bancs du lycée. Ne citons que quelques noms fameux : Gérard de Nerval, Léon Blum, Jules Renard, Gustave Doré, Théophile Gauthier… et Honoré de Balzac qui a fait au lycée l'honneur d'y être un élève médiocre.

Après la vie mouvementée de la Maison Professe, celle du lycée Charlemagne sera intimement liée à l'histoire. Les révolutions et les révoltes des « trois glorieuses » de 1830, plus récemment « mai 1968 », ont fait vibrer les couloirs de l'établissement. Les guerres ont fauché de très nombreux élèves ou anciens élèves.

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Le lycée Charlemagne, proche du quartier juif du Marais, a payé un lourd tribut durant les années noires de l'occupation et de la collaboration, lorsque triomphaient la haine, l'exclusion et la mort. Dans l'escalier d'honneur une plaque commémore le nom de 19 innocents qui n'avaient commis qu'un crime : être nés juifs.